vendredi 28 avril 2017

Dire la Mort à un enfant

un sujet encore tabou

Comment dire la mort, comment expliquer l'inexplicable, en tenant compte de l'âge de l'enfant, des circonstances... et de notre propre incapacité à trouver les mots lorsque ceux que nous aimons nous quittent ?

L'enfant face au deuil, voilà le difficile sujet abordé dans le dernier Guide "Panorama", sorti ce mois-ci. Extraits choisis.

Quelle représentation de la mort chez l'enfant ?


l'enfant et le deuil
Il est encore fréquent aujourd'hui de croire que les enfants ne comprennent pas "totalement" le décès d'un proche, parce qu'ils "n'ont pas de vraie représentation de la mort" ou parce qu'ils ne semblent pas manifester leur douleur comme les adultes. "C'est une erreur, assure le Dr Michaël Larrar, pédopsychiatre et spécialiste du deuil chez l'enfant et l'adolescent. Il ne faut pas imaginer le ressenti d'un enfant en fonction de ce qu'il manifeste. Il n'a pas encore les outils pour assimiler, voire "digérer" ce qui lui arrive. Il met alors en place un système de protection pour faire face au traumatisme du deuil, ce qui peut leurrer l'adulte".



Une génération "post-attentat" ?


Bayard Presse
"Quand il y a eu les attentats de Nice [en juillet 2016], j'ai pensé : "maintenant, on ne sera jamais en sécurité, ça va arriver tout le temps", se souvient Raphaël, 9 ans. "Je crois que ma génération va être différente parce qu'elle a été marquée par les attentats ; on en parle entre nous, et on a parfois l'impression que nos parents sont un peu dépassés, parce qu'ils n'ont jamais connu ça. Moi, ça a été mieux quand j'ai pu en parler à ma grand-mère. Elle a vécu la guerre, et elle avait exactement mon âge pendant les bombardements à Paris, elle peut comprendre. Elle m'a beaucoup expliqué de choses et ça m'a fait réfléchir et grandir aussi".

[sur les conséquences des attentats en France sur les enfants, voir aussi mes post  : Attentats de Paris, 13 novembre 2015  ainsi que Attentats de Paris : la presse jeunesse se mobilise ]


Faut-il partager ses croyances ou ses doutes sur la mort ?


partager ses croyances et ses doutes
"J'encourage les parents à dire ce qu'ils pensent de la vie après la mort s'ils y croient, rapporte le Dr Larrar. Mettre un enfant à côté d'une religion à laquelle on adhère, c'est l'écarter de quelque chose d'important pour soi et qui pourrait l'aider.

Il est important d'intégrer l'enfant dans les croyances de la famille, cela fait partie de la transmission, et cela l'enracine. Ce qu'il ne faut pas, c'est laisser l'enfant dans le flou par rapport à ce que nous pensons. Pour un enfant, c'est inquiétant et insécurisant.


Leur apprendre à être des vivants


le Dieu des vivants
"Ce que l'on peut dire avec certitude à l'enfant, c'est qu'on meurt quand on a fini sa vie, témoigne Bénédicte Jeancourt, rédactrice en chef de Filotéo (Bayard Presse). Mais savoir quand cette fin arrivera, c'est impossible ! Tout ce qui vit dans l'univers naît puis meurt un jour : les plantes, les animaux, les hommes...
Ce qui change pour les chrétiens, c'est de croire que tout ne s'arrête pas là, contrairement aux apparences ! Cela donne une confiance qui change ma façon d'appréhender la vie. Le Christ nous dit qu'il est le Dieu des vivants. Alors, soyons des vivants ! Le reste ne nous appartient pas. Et cela, les enfants le comprennent facilement.


Guides Panorama


Quel que soit son âge, l'enfant nous pousse dans nos derniers retranchements, nous oblige à affronter les questions que nous avons pu refouler ou enfouir au plus profond de nous-mêmes. Qu'il s'agisse du premier "pourquoi il bouge plus l'oiseau ?" au plus précis "Est-ce que papy va pourrir dans la terre ?", nos enfants nous révèlent à nous-mêmes en tant qu'êtres toujours en construction...



Dire la mort à un enfant, de Marie-Sophie Boulanger et rédaction de Panorama, Les Guides Panorama, Bayard Editions, 2017, 5, 90 euros.